Après avoir terminé son porridge, ses toasts et son jus de citrouille, Keylian quitte la Grande Salle en compagnie de quelques Serdaigle. C’est l’heure de se diriger vers les cachots, pour un cours qui est assurément très utile, à savoir les potions. C’est la tête bien redressée, avec ce port altier si caractéristique des vingt-huit sacrés dignes de ce nom, que le jeune homme se glisse dans la salle de classe de Rogue. Comme à l’accoutumée, c’est sombre et et déjà plein de brume, ce qui fait qu’il fronce légèrement le nez. Sans s’attarder, histoire de ne pas s’attirer les foudres de Rogue même si les Travers font partie de ses élèves préférés, Keylian s’installe derrière une des grandes tables réservées aux élèves. Il est mêlé à un groupe d’autres Serdaigle qui sont arrivés en même temps que lui et, s’il a envie de lancer une plaisanterie à laquelle il vient de penser, le Travers se retient parce que le professeur s’éclaircit la gorge. Aussitôt, le silence se fait dans la salle. Docilement, Keylian sort son manuel avancé de préparation de potions et écoute le programme. Visiblement, c’est quelque chose de spécial qui se prépare. Keylian comprend qu’ils vont apprendre à préparer du Veritaserum, ce qui ne manque pas d’éveiller son intérêt. Néanmoins, c’est une potion complexe, qui prend beaucoup de temps. C’est donc un projet qui va se dérouler sur au moins un mois et, pour se faciliter la tâche, ils seront en binôme.

Hochant la tête en signe d’approbation, Keylian commence à se tourner vers son voisin, quand le maître des potions leur précise alors que ce sera lui qui formera les binômes. Keylian reste alors tranquille en attendant que son nom soit cité et, quand c’est le cas, il comprend qu’il sera associé à Arya Lestrange. Pendant quelques secondes, il reste bêtement hébété. Ce n’est pas qu’il n’en a pas envie. Il connaît Arya depuis qu’ils sont tout petits et ils se sont toujours bien entendus. Mais ces derniers temps, les choses ont un peu changé - et pour cause. Après ce qu’il s’est passé entre eux, ils n’ont pas vraiment reparlé ou, du moins, ont échangé le strict nécessaire quand il le fallait. Alors cette combinaison ne l’arrange pas vraiment. Mais comme il n’a pas le choix, Keylian se lève, prend son sac et rejoint Arya à la table où elle est déjà installée. « Salut » souffle-t-il en s’asseyant à côté d’elle. Il est un peu gêné, mais ils devront bien faire avec. Il pose donc ses affaires, sort son livre et commence à jeter un coup d’oeil à la liste d’ingrédients. « Je vais chercher ce qu’il nous faut. » Il se relève pour se diriger vers le placard, attendant son tour, avant de revenir avec le nécessaire. « Voilà, on ne devrait avoir besoin de rien d’autre. » Commençant à suivre les instructions du manuel, Keylian se doute néanmoins qu’ils ne pourront pas rester silencieux à chaque cours de potions. « Tu… Tu vas bien ? »

Deux semaines, cela faisait deux semaines qu’Arya avait réussi à éviter une conversation avec Keylian. Elle était encore particulièrement gênée de s’être ainsi allée avec lui, elle était après tout une sang-pur, et une Lestrange, elle n’aurait jamais dû laisser partir sa vertu de cette manière, et encore moins de le faire avant le mariage. Elle se devait à présent de garder le secret, et de ne surtout pas le dire à sa famille et surtout à son père, elle risquait en effet très gros. Elle s’efforçait donc d’oublier cet égarement le plus possible et de fuir Keylian comme la peste, comme si sa vie en dépendait, seulement, elle ne pourrait pas l’éviter indéfiniment, elle le savait. Elle essayait simplement de repousser cette confrontation fatidique.

Totalement dans ses pensées, elle fut ramenée à la réalité par sa sœur jumelle, qui entreprit de l’inviter à la suivre jusqu’au cours de potion. Une fois dans la salle, elle s’installa avec sa sœur, non loin de ses amis. Elle tenta d’éviter un maximum le regard de Keylian qui se posait systématiquement sur elle, et d’écouter en même temps la leçon du jour qui allait porter sur le Véritasérum. Elle espérait intérieurement ne pas devoir être victime de cette potion. Elle devint rapidement pâle rien que d’y penser, mais elle fut ramenée de nouveau à la réalité par suite d’un énième coup de coude de sa sœur. Confiante, elle lui souriait jusqu’à entendre le Professeur indiquer qu’il allait pour aujourd’hui changer les groupes habituels et qu’il allait en former d’autres. Elle tenta de rester donc de marbre lorsqu’elle entendit le prénom de Keylian et le sien côté à côte. Elle doit se faire à l’évidence, elle aurait devoir travailler avec lui mais allait-elle réussir à ne pas lui adresser la parole ?

Cela allait être vraiment difficile, notamment lorsqu’il entreprit de s’installer à ses côtés et de la saluer, elle ne put l’ignorer en public, elle entreprit donc de le saluer « Salut » se contenta-t-elle de dire tout simplement en laissant un nouveau silence s’installer. Elle n’eut pas la possibilité de le rompre, ce fut de nouveau lui qui le fit en allant cherchant les ingrédients et en le lui signalant. Il revint quelques instants après, et ils purent débuter la préparation. Tout en débutant la préparation, il entreprit d’engager la conversation. « Ça va » lui dit-elle tout simplement avant de lui retourner la question « Et toi ? » lui demanda-t-elle tout simplement. « Par quoi on commence ? » lui demanda-t-elle tout simplement.

Si le jeune Travers est embarrassé, il ne peut s’empêcher de remarquer qu’Arya, elle, a l’air distante. Comme il la connaît quasiment depuis toujours, il sait qu’elle est loin d’être aussi froide qu’elle voudrait le faire croire. Alors il se dit qu’elle lui en veut peut-être. Elle regrette peut-être ce qu’il s’est passé entre eux. Ou alors elle a honte, il n’en sait rien. Et c’est précisément cette ignorance qui le gêne encore plus. Il a voulu respecter le choix de la jeune femme de l’éviter, mais il se fait l’impression d’être la pire des ordures qui a obtenu ce qu’il voulait et ne lui accorde donc plus d’attention. Il n’y a peut-être rien de plus éloigné de la vérité. Au-delà du fait d’être mal à l’aise parce qu’il ne sait plus très bien comment se comporter avec elle, Keylian n’a pas envie de perdre leur amitié. Elle existe depuis leur plus tendre enfance et il ne peut s’empêcher de se demander s’ils n’ont pas tout gâché en se laissant aller aux pulsions les plus chimiques qui soient. Et en même temps, ce désir qu’ils ont concrétisé ce soir-là, c’est peut-être loin d’être anodin. Bien sûr, le Serdaigle le ressent, quelque part, au plus profond de lui. Néanmoins, c’est assez difficile à admettre, notamment parce que ça impliquerait une foule de conséquences, mais aussi et surtout parce qu’il n’a aucune idée de ce qu’elle peut bien ressentir, elle. C’est encore plus le cas à l’instant précis, alors qu’elle n’a pas l’air d’avoir très envie de lui parler.

Arya a quand même la politesse de lui retourner sa question. « Ça va, merci. » Au moins, c’est concis. Mais ce n’est peut-être pas tout à fait vrai, ce qui ne manque pas d’ironie quand on considère ce qu’ils s’apprêtent à préparer ensemble. Il ne manquerait plus qu’ils se mettent à préparer de l’Amortentia ensuite, histoire de révéler ce que chacun a au plus profond de son coeur. « On va commencer par hacher les plantes. » Le jeune homme glisse les ingrédients entre elle et lui, puis expose son manuel entre eux deux aussi. Comme ça, ils ont tout à portée de main et peuvent suivre directement les instructions du livre. « Tu veux t’occuper d’un ingrédient en particulier d’abord ? » Lui-même n’a pas de préférence et ne veut pas donner l’impression d’être trop directif, même si elle le connaît probablement suffisamment bien pour savoir que ce n’est pas son genre. « Ce que je trouve difficile d’avance avec cette potion, c’est que comme elle n’a ni odeur ni couleur, c’est compliqué de savoir si on fait bien les choses ou pas. » Keylian allume le chaudron qu’ils partageront pour les quatre semaines à venir, sentant déjà le silence s’installer. Au début, il ne dit rien, se concentrant sur les premières étapes de la préparation. Mais assez vite, ça devient pesant. Il se racle alors la gorge, cherchant ses mots. « Arya, écoute… Je ne sais pas ce que tu penses de ce qu’il s’est passé, mais… Sache qu’on fera ce que tu veux. Si tu préfères oublier à tout jamais, alors on le fera. Mais… Je veux pas qu’on passe notre temps à s’ignorer mutuellement… »

Distante et embarrassée, Arya l’était, même après sa longue discussion avec Freya quelques jours plus tôt. Elle essayait cependant de ne pas l’être surtout en présence des autres et encore plus en cours. Mais c’était très difficile, surtout qu’elle avait énormément de mal à cacher ses émotions, surtout en ce moment, elle essayait cependant tant bien que mal à rester polie et courtoise avec lui. Ainsi, elle entreprit de répondre à ses salutations, et elle s’était empressée de lui dire qu’elle allait bien, même si c’était en partie le cas. Elle cherchait en parallèle à éviter son si beau regard, mais elle ne put l’éviter bien longtemps.

Après être allé chercher les ingrédients, il s’empressa de revenir et de lui demander par quoi est-ce qu’elle voulait commencer, elle s’empressa de jeter un œil au manuel, et elle lui dit « Je suis d’accord, difficile mais pas impossible, je vais faire les dosages, et les insertions dans le chaudron, tu t’occupes du reste » lui fit-elle tout simplement, elle était après tout la mieux placer pour le faire, de part le fait qu’elle était assez minutieuse et rigoureuse en potions.  Un nouveau silence entreprit de s’installer, avant qu’il ne soit rompu par Keylian. Il entreprit de reparler de cette fameuse soirée, elle aurait bien aimé l’oublier, cependant Arya ne pouvait guère s’empêcher de s’interroger, se souvenait-il de ce qu’il avait fait ? l’avait-il fait par désir ou simple plaisir de coucher à droite et à gauche avec des sangs-purs ?

« Tu t’en souviens ? Je n’arrive pas à m’en souvenir c’est bien ça le pire » lui dit-elle discrètement, « Je cherche à rassembler les morceaux et à comprendre » lui fit-elle tout simplement.

« De toute façon, j’adore les challenges. » Il n’est pas un Serdaigle pour rien. Apprendre, c’est l’une des choses qui le passionnent le plus. La difficulté ne l’a jamais rebuté, au contraire. « J’espère qu’on apprendra aussi à concocter Felix Felicis. » Suivre les instructions à la lettre, peser minutieusement les ingrédients, prendre soin de bien respecter les dosages, ça ne le dérange pas. Et il sait à quel point les potions peuvent être utiles, comme (à ses yeux) à peu près toutes les matières qu’ils étudient. Il ne tarde donc pas à se mettre au travail, maintenant qu’ils se sont répartis les tâches avec Arya. Les débuts de leur collaboration sont silencieux, mais Keylian sait bien qu’ils finiront par devoir parler de ce qu’il s’est passé entre eux. Alors au final, peut-être qu’il vaut mieux tard que jamais. S’ils ne mettent pas les choses au clair entre eux, ils resteront gênés l’un vis-à-à-vis de l’autre et l’ambiance risquerait de devenir pesante. Il se lance donc, mais la réponse d’Arya le prend de court. Elle lui dit qu’elle ne se souvient pas et il ne sait pas trop comment le prendre. Qu’est-ce que ça veut dire ? Est-ce qu’elle a tout oublié ? Mais dans ce cas, pourquoi l’éviterait-elle ? Perplexe, mais aussi un peu vexé, Keylian prend le temps de la réflexion avant d’ouvrir la bouche. Il n’a pas envie de dire une bêtise et il n’a pas non plus envie de parler pour rien. « Tu veux dire que tu ne te souviens de rien du tout ? »

La concoction de Potions, un art fort difficile mais pas impossible à magner. Difficile pour certains, mais pas pour Arya, et encore moins pour Keylian. Ils étaient tous deux très doués dans cette matière, ils n’avaient tous deux pas peur de l’échec, car ils ne connaissaient tout simplement pas ce nom, et parce qu’ils étaient tous deux déterminés à réussir cette préparation en binôme, conflit ou non. Alors que Keylian était partie chercher les ingrédients, Arya commençait à mettre en route le feu se trouvant sous le chaudron. Silencieuse, elle avait attendu que Keylian prenne la parole pour lui donner des instructions.

Ils s’empressèrent de débuter la préparation. Une préparation quelque peu difficile vu le temps qu’ils avaient pour la faire ; mais cela ne les empêchait pas de converser. Keylian fut le premier à l’interroger sur leur fameuse « soirée », elle s’était peut-être mal exprimée, car Keylian ne lui répondit pas de suite, un petit silence entreprit de s'installer jusqu'à ce qu'il daigne à lui parler, elle s'empressa donc ensuite de lui en dire davantage (dans le doute, car elle ne savait absolument pas les pensées de son ami), « Dois-je te rappeler que nous avons beaucoup bu pendant cette soirée, j’ai sûrement beaucoup abusé de la boisson, et je t’avoue que…. Mis à part m’être réveillée à des coter à moitié nu, je ne me souviens de très peu de chose » lui avoua-t-elle discrètement, tout en essayant de rester neutre dans ses propos. « Toi aussi, tu étais bien éméché cela dit, mais peut-être que tu te souviens de davantage de chose » lui fit-elle remarquée avant de reprendre « Tu peux me passer l’eau du fleuve de Léthé à ta gauche » lui demanda-t-elle tout simplement ; une fois la fiole en sa possession, elle entreprit bien vite d’y introduire quelques gouttes.

« Peut-être, oui. Je n’ai pas tout oublié, c’est sûr. » Il doit mieux tenir l’alcool qu’elle, ce qui n’a au fond rien d’étonnant puisque il est plus grand et plus lourd qu’elle. Mais ça lui paraît mauvais signe qu’elle dise n’avoir aucun souvenir, d’autant plus que ça l’embarrasse davantage encore d’avoir à mettre des mots sur ce qui s’est passé. Il se racle légèrement la gorge, bien content d’avoir quelque chose à faire en même temps que lui parler. Ça lui permet de garder les mains occupées. « Eh bien… Vu ce dont tu te souviens au réveil... » Mais apparemment, Arya a l’air de douter. Keylian ne sait pas pourquoi, mais en-dehors du fait que ça n’ait rien de réjouissant qu’elle ne se rappelle pas avoir passé la nuit avec lui, ce qui le perturbe encore plus c’est qu’il se demande pourquoi elle l’évite depuis plusieurs semaines. Si elle n’a pas compris qu’ils ont effectivement eu une aventure, alors à quoi est-ce que ça rimerait ? Il le comprendra peut-être au cours de cette discussion ou, du moins, il l’espère. Mais cette fois, il ne veut pas qu’il y ait le moindre doute. Autant appeler un chat un chat, puisque la jeune femme lui demande d’aider sa mémoire. « On a couché ensemble, toi et moi » souffle-t-il à voix basse, de manière à ce que personne d’autre ne les entende. « Je croyais que c’était pour ça que tu avais pris tes distances depuis. » Ce n’est pas un reproche, mais il exprime un peu son étonnement ou plutôt son désir de comprendre.

Arya venait d’avouer à Keylian, tout ce dont elle pouvait se rappeler de cette fameuse soirée. Hésitante sur ce qu’il s’était réellement passé, elle ne tarda pas à lui cacher malgré tout ses doutes. Elle en avait parlé à Freya, mais elle ne savait pas encore trop quoi en penser. Pour se défendre, elle lui avait également parlé des innombrables verres de whisky pur feu qu’elle avait pu boire, tout comme le reste de la bande. Rapidement, elle lui avait alors demandé, si de son côté, il avait des souvenirs, cherchait-elle à se protéger ? probablement, mais elle tenta de faire tout son possible pour ne rien laisser transparaître.

Heureusement qu’ils étaient en cours, car Arya aurait été très silencieuse si cela n’avait pas été le cas.  Elle attendait patiemment ses réponses, mais peut-être aurait-elle mieux fait de ne pas les entendre. Il confirma avoir été éméché, mais il semblerait qu’il ait davantage supporté la boisson qu’elle car il se souvenait pour partie de tout. L’heure de la révélation n’allait pas tarder à sonner. Il lui avoua bien vite sans tourner autour du pot ce qu’ils avaient fait. Si Arya avait pu avoir quelques doutes, elle était à présent sûre de vraiment l’avoir fait, grand dieu, et dire qu’elle ne s’en souvenait même pas. Elle ne put s’empêcher de s’en mordre les lèvres, surtout qu’il s’agissait de sa première fois, et elle n’en avait absolument aucun souvenir, à l’exception de ce baisé langoureux en cours de « jeu ».

Keylian cherchant à obtenir une réaction et des explications de sa part, s’était empressé de lui demander si elle l’avait fui pour toutes ses raisons. Pour partie oui, mais également parce qu’elle ne voulait pas se prendre la vérité en pleine face. « Et si c’était le cas tu m’en voudrais ? » lui demanda-t-elle avant d’ajouter « J’avais surtout peur de te confronter pour tout avouer, et pour te dire quoi, que je ne me souvenais absolument de rien, mis à part le baisé que nous avions échangé pendant notre fameux petit jeu, et que j’étais également très gênée, tu n’es pas sans savoir ce que mes parents pourraient me faire s’ils l’apprenaient » conclut-elle tout simplement.

« De plus, je ne désirais en aucun cas que tu te foutes de moi après ; après tout, je ne suis pas la première et la dernière fille avec qui tu couches » s’empressa-t-elle d’ajouter tout en ayant pu entendre quelques bruits de couloirs depuis ces quelques dernières années. Dans son ton, on pouvait largement sous-entendre une certaine frustration, mais visuellement, elle se contenta de faire comme si de rien n'était, cachant ses émotions.