Ft Arya & Théodore Nott

Elle lui demande pourquoi ?

Un instant, tandis que les regards s’accrochent l’un dans l’autre, il perçoit avec acuité le fait qu’elle a pensé à ce qu’il puisse l’embrasser. Il recule instinctivement. Y’a-t-il pensé ? Cela lui semble presque surfait au vu de leurs situations. Ce serait surtout terriblement stupide vu les plans qu’il a en tête pour qu’ils puissent – l’un et l’autre – se débarrasser de ce lien pesant et ridicule à leurs poignets.

Elle fait bien de dire qu’elle n’est pas comme lui. C’est un fait, comme le ciel n’est pas la terre. Il est fer, dur à tordre, apte au sang et aux gorges faciles alors qu’elle n’est que pluie, fraiche et nécessaire certes mais qui ne ferait que le rouiller s’il la laisse s’approcher.

Il l’entend se faire raisonnable, offrir une branche d’olive maladroite et opportuniste. C’est touchant mais ça ne sert pas sa cause. Il n’y a pas que Keylian dans l’équation. Il y a Daphné. Le souvenir de la blondeur angélique lui imprime un saut dans la poitrine et il réfléchit à toute vitesse. La brune devant lui est tout autre mais il pourrait. Il pourrait accepter : une équipe, une famille, une épouse solide à ses côtés malgré les travers – et c’est le cas de le dire. Mais la facilité ne lui sied pas au teint, l’abandon non plus. Un quart de secondes, il hésite avant d’inspirer brutalement.

Non.

Il faudrait qu’elle le déteste pour de bon. Visiblement, il croyait en avoir fait assez pour ça, juste respirer aurait du suffire d’ailleurs mais visiblement, ce n’est pas le cas. Théodore rajuste ses manches, l’air volontiers noble, de l’arrogance au bout des doigts et de la pierre insondable sur le visage. Il choisit ses mots avec attention dans son esprit afin que le fossé soit infranchissable. « Si je comprends bien, Arya. » Il appuie sur le prénom avec un tel dédain qu’il est difficile de ne pas s’en rendre compte. « Vous espérez régner sur votre amant, sur moi et sur la société ? » Le sourire se fait impitoyable et il la considère sereinement. La douleur à la jambe a un écho déplorable en cet instant mais il n’a pas la patience d’avoir pitié pour lui-même et encore moins pour la jolie brune devant lui. « Nous avions un accord avant ce mariage : vous gardiez votre amant et je trouvais un moyen de nous rendre notre liberté. Et maintenant, vous voulez changez les termes ? Qu’est-ce que vous m’apporteriez en réalité ? Une famille ? » Il a un rire sec. « N’importe qui peut le faire au final ou vous pensez-vous exceptionnelle ? » Elle s’éloigne et il s’avance vers elle jusqu’à la coincer contre le mur adjacent. « Vous n’avez aucune notion d’honneur, pas la moindre capacité à vous retenir et pas vraiment de jugeotte non plus il me semble sinon vous vous seriez enfuit avec lui depuis un moment déjà. Personne ne vous en aurez voulu, moi encore moins que les autres : des amants œuvrant contre le sort et ses indélicatesses ? Ce serait passé plus facilement que vous ne semblez le croire. Mais non. » L’ivoire se découvre dans un sourire ténébreux et aussi tranchant qu’une lame. « Non, vous avez tout voulu. Parce qu’il s’agit de cela n’est-ce pas ? Vous vouliez être bien vu de vos parents, de la société malgré ce que vous êtes. Le luxe on ne le trouve pas dans des miteuses petites chambres d’hôtels, bien sûr ni même en étant la maitresse d’un héritier déjà promis à une autre. C’eut été dommage de devoir vivre d’amour et d’eau fraîche uniquement. » Il est cruel peut-être mais c’est nécessaire pour qu’elle comprenne complétement qu’il n’est homme à céder en rien. « Et si je vous entends encore parler de mon enfance ou de quoi que ce soit qui a attrait à ma famille Arya, que Merlin m’assiste mais je ferais moi-même vos valises. »

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Ft Arya & Théodore Nott

La gifle le percute et il s’humecte le coin de la bouche d’une langue vermeil, un rictus effronté sur le visage. C’est bien la première fois qu’elle montre autre chose qu’une personnalité d’huître. C’est aussi la première et dernière fois qu’elle a ce geste avec lui semble-t-il lui dire d’un regard noir. « Je vous interdis de me juger ainsi, après tout, vous ne me connaissez pas » Le rictus s’accentue, sombre et vénéneux. « Ah, mais je connais précisément de vous ce que vous avez bien voulu me montrer. Or, je suis fort contrarié, » Ou pas « de vous l’apprendre mais ça n’a rien de bien reluisant. » Il passe le revers de son index sur sa mâchoire, là où le plat de sa main est venu se poser. Tant d’hésitation dans sa voix, tant d’effroi. Elle s’attendait surement à ce qu’il plie, à ce qu’il sautille gentiment sur ses jolies genoux en applaudissant cet effort soudain de réconciliation.

Le regard se coule dans un métal implacable. « Pourquoi ne pas le faire alors ? Pourquoi ne pas vous enfuir ? Il y a des potions, de la magie. Vos parents sont puissants mais tout est possible non ? Omnia vincit amor. L’amour triomphe de tout. Il y avait tant de solution en vérité, si nombreuses. » L’image de Daphné lui revient en tête et le cœur se crispe quelques secondes en un marbre froid. « Votre amant, » Il le dit comme une insulte parce que cela en est précisément une entre ses lèvres. « ne peut-il pourvoir à votre sécurité ici ou ailleurs, Arya ? » Le rictus meurt et sonne comme un gong. « Comme c’est étonnant. » Les mots se détachent en sentence glacée. « Vous avez pensé à beaucoup de choses visiblement et vous n’avez agi que sur un seul plan. Celui de satisfaire vos petites envies d’adolescente. » Il se recule, le pas appuyé sur sa jambe valide.

Il n’a que mépris profond pour ces histoires de rêve. Elle vit dans un cosmos qui n’est vraisemblablement pas le sien. Il ne s’offusque pas d’ailleurs quand elle lui parle de sa solitude. Il n’a pas choisi cet état de fait pas plus que son éducation mais il n’y a rien à regretter sur le sujet. Il est ce qu’il est et ne s’en excuse pas. « Donc, vous vous êtes rendu compte qu’on ne vivait pas d’amour et d’eau fraîche et maintenant, vous avez décidé que cela devait devenir mon problème. » Le bleu se cristallise dans une indifférence palpable. « C’est bien. »

Un silence pesant s’étire, la mésalliance évidente en les voyant tendue, face à face, à se regarder en chien de faillance. Théodore observe. Un souffle nouveau le perfore, des pensées se font rouages dans son esprit. Le pour et le contre s’affronte sans un mot et il rajuste ses manches dans un geste sec. « Voilà ce que nous allons faire. Tout se marchande en ce bas monde. Tout a un prix. Trouvez la bonne offre à me faire pour me convaincre et j’envisagerai peut-être la chose. Je vous donne jusqu’à la fin de la semaine. » Il esquisse un salut de la tête, prenant ainsi congé. Le corps l’élance, un trouble serein lui constelle le fond des yeux, la fatigue engourdit quelque peu ses gestes.

Il s’éloigne enfin mais avant de franchir la porte, il darde un dernier regard vers sa jeune épouse, « Bienvenue dans le monde des adultes, ma chérie. » puis disparait sans la moindre trace d’empathie dans la voix.

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